Surmontez les séquelles de lésions cérébrales grâce à la neurologie fonctionnelle
Au fil du temps, notre cerveau est exposé à diverses situations et conditions qui le mettent à l’épreuve. Généralement, le cerveau s’adapte et continue à fonctionner de façon optimale. Cependant, certains assauts, qu’ils soient de nature physique, chimique, environnementale ou émotionnelle, vont créer des lésions cérébrales qui génèrent des séquelles. Il existe deux types de lésions au cerveau, celles dites ablatives et celles dites physiologiques, c’est-à-dire fonctionnelles.
Les lésions ablatives sont associées à un problème de destruction du tissu neural. Ce type de lésion est habituellement causé par un accident vasculaire cérébral (AVC), un traumatisme crânien (commotion cérébrale), une tumeur ou un syndrome de coup contre coup cérébrale, tel qu’un coup de fouet (whiplash) subi lors d’un accident de la route. Dans ces cas, le remplacement du tissu neural endommagé est très lent et parfois impossible, faisant en sorte que la restauration de la fonction cérébrale repose sur le principe de la neuroplasticité, soit l’utilisation de voies neurales alternatives ou la création de nouvelles connexions synaptiques. Ceci peut parfois se produire naturellement pendant le processus de guérison, sinon la neuroplasticité peut être stimulée par des traitements de neurologie fonctionnelle.
Les lésions fonctionnelles sont associées à des problèmes de sous-stimulation du tissu neural dans le cerveau ou la moelle épinière. À cause de la neuroplasticité des neurones, des variations de stimulation qui ne sont pas considérées optimales vont créer des changements de structures et de fonctions dans le cerveau. Ces changements vont affaiblir un système de neurones qui, à son tour, aura pour effet d’en affaiblir d’autres, tel un effet domino. Ceci se produit selon le principe de diaschisis, un phénomène où un système de neurones fait défaut à cause d’une diminution de sa stimulation en provenance d’un système de neurones connecté, mais distant. La neurologie fonctionnelle utilise ce principe pour identifier et traiter les systèmes neurologiques affectés afin de rétablir un état de stimulation optimale.
Prenez, par exemple, une situation où un plâtre est appliqué sur votre bras. Il se développe une sous-stimulation du bras et la partie correspondante du cerveau qui est dédiée à détecter le mouvement de ce bras va s’atrophier. Dans le but de minimiser l’atrophie pendant la durée du plâtre, vous pouvez visualiser régulièrement des exercices du bras qui est immobilisé, comme s’il y avait de l’amplitude de mouvement. Cette visualisation se passe dans une autre région du cerveau, mais par diaschisis, elle stimule l’endroit du cerveau qui est en train de s’atrophier et permet de diminuer l’effet négatif.
Dans les cas de lésions cérébrales, un autre principe exploité par la neurologie fonctionnelle afin de stimuler des voies neurologiques alternatives est celui de la relation embryologique homologue. Ce principe repose sur le fait que des groupes de neurones qui se développent ensemble au sein de l’embryon conservent une relation fonctionnelle après la naissance et tout au long de notre vie. Puisque, par exemple, les muscles des yeux et ceux de la colonne vertébrale sont issus du même groupe de cellules nerveuses embryonnaires, un exercice des yeux peut influencer le tonus musculaire de la colonne vertébrale. En stimulant un groupe de neurones ayant une relation embryologique homologue, c’est-à-dire un effet sur une fonction particulière similaire, il est possible de créer des voies alternatives qui compenseront pour des groupes de neurones ayant subi un dommage irréparable.
D’autres approches utilisées en neurologie fonctionnelle pour traiter des lésions cérébrales ablatives ou fonctionnelles consistent à stimuler le système vestibulaire et les récepteurs liés aux articulations des vertèbres de la colonne cervicale. De nombreuses interconnexions synaptiques se trouvent entre les récepteurs du cou, le système vestibulaire, le cervelet et les hémisphères du cerveau. Pour traiter des dysfonctions de ces régions, les principes de diaschisis et de relation embryologique homologue sont appliqués.
En 1997, le chiropraticien et neurologue fonctionnel qui a traité le joueur de hockey Sidney Crosby avec succès suite à sa commotion cérébrale, Dr Frederick Carrick D.C., a publié une étude concernant l’effet d’une manipulation de la colonne cervicale sur la fonction du cerveau. Lorsque le cerveau ne fonctionne pas de façon optimale, ceci se manifeste par une tache aveugle physiologique plus grande sur le côté de la fonction cérébrale diminuée. Donc, en cartographiant la tache aveugle physiologique des yeux avant d’effectuer une manipulation cervicale, puis immédiatement après, le Dr Carrick a pu démontrer l’effet de stimulation positive de l’ajustement sur la fonction du cerveau.
Dans son étude, le Dr Carrick a noté que la tache aveugle physiologique diminuait sur le côté où les mécanorécepteurs des premières vertèbres cervicales étaient activés par un ajustement chiropratique. L’ajustement permettait non seulement de rétablir la biomécanique des vertèbres cervicales, mais aussi de normaliser le message des mécanorécepteurs vers le cerveau.
La colonne cervicale a de nombreuses interconnexions synaptiques avec le système vestibulaire, le cervelet et les hémisphères cérébraux du cerveau. C’est via ces interconnexions que la tache aveugle physiologique aura une réponse neurophysiologique suite à une impulsion synaptique provoquée par l’ajustement des capsules articulaires des vertèbres de la colonne cervicale. Cette réponse est démontrée par le changement sur les neurones visuels du champ réceptif cortical de la tache aveugle physiologique. D’ailleurs, il n’est pas rare qu’un patient remarque une amélioration de sa vision après des ajustements chiropratiques aux vertèbres cervicales et ceci est dû à la stimulation des interconnexions synaptiques.
L’étude du Dr Carrick a permis de comprendre que la grosseur et la forme de la tache aveugle physiologique pouvaient être utilisées comme une mesure de l’état central intégré du thalamus et du cortex cérébral, car l’amplitude du potentiel synaptique des récepteurs somatosensoriels reçue par le thalamus influence la fréquence d’activation synaptique des circuits entre le cervelet, le thalamus et le cortex. Ceci a également été démontré dans d’autres études et on utilise ce principe en neurologie fonctionnelle pour vérifier l’amélioration de la fonction cérébrale en cours du traitement d’une condition de lésion cérébrale.
Dans un article publié en novembre 2011, le Dr Carrick a expliqué que le système vestibulaire est un puissant activateur de la fonction cérébrale et lorsqu’il est stimulé on peut observer une amélioration des symptômes liés aux maux de tête, au manque de concentration, à la perte d’équilibre, ainsi qu’aux problèmes de démarche et de coordination. Par conséquent, les traitements de neurologie fonctionnelle combinent la stimulation vestibulaire avec des exercices visuels et d’autres exercices physiques afin d’optimiser l’effet de plasticité sur la fonction synaptique neurologique dans le cerveau.
Dans une étude réalisée au Sport Injury Prevention Research Centre du Faculty of Kinesiology de l’Université de Calgary, le Dr Kathryn Schneider, PhD, a démontré que des traitements vestibulaires ainsi que des ajustements de la colonne cervicale aidaient des athlètes qui souffraient de symptômes persistants liés à une commotion cérébrale à reprendre leur entrainement après seulement huit semaines de traitements.
Publiée dans le British Journal of Sports Medecine au printemps 2014, l’étude comporte 31 athlètes, hommes et femmes, ayant des symptômes chroniques d’étourdissement, de douleurs au cou et de maux de tête à la suite d’une commotion cérébrale occasionnée lors de la pratique de leur sport. Ils ont été divisés en deux groupes : un groupe contrôle et un groupe d’intervention. Les deux groupes ont reçu des soins pendant huit semaines qui consistaient d’exercices d’amplitude de mouvement, d’éducation posturale et de repos physique et cognitif, et ce, jusqu’à rémission des symptômes. Ensuite ils ont suivi un protocole d’exercice avec effort progressif. Le groupe d’intervention a également reçu des traitements de stimulation de la colonne cervicale, de même que des soins de réhabilitation du système vestibulaire. Le résultat de l’étude a été étonnant : 73 % des participants dans le groupe d’intervention étaient asymptomatiques après huit semaines, comparé à seulement 7 % dans le groupe contrôle, ce qui a permis de conclure à quel point les traitements de la colonne cervicale et du système vestibulaire étaient important lorsqu’il s’agit de surmonter les séquelles d’une commotion cérébrale.
Une autre étude récente provient de l’Université de Buffalo et a été réalisée par le Dr John Leddy, professeur d’orthopédie. Il a comparé des patients avec des traumatismes au cou à des patients ayant subi une commotion cérébrale avec des symptômes persistants. Non seulement a-t-il constaté une similitude dans les symptômes, mais il a remarqué que dans les deux cas on retrouve des problèmes cognitifs, tels des troubles de concentration, de mémoire, de céphalées, d’étourdissements, d’insomnie ainsi que des problèmes émotionnels. Le Dr Leddy a conclut qu’il est difficile de distinguer un patient qui a subi un traumatisme au cou d’un patient qui a subi une commotion cérébrale, car ils peuvent souffrir des deux conditions en même temps.
D’autre part, lorsqu’on analyse des données provenant d’études biomécaniques concernant les coups de fouet (whiplash), la force d’accélération-décélération requise pour provoquer une entorse cervicale est environ 4,5 G. Dans le cas d’une commotion cérébrale, le facteur accélération-décélération de la tête se situe entre 60 à 120 G. Il est fort probable qu’une force aussi intense puisse également provoquer une lésion à la colonne cervicale et si celle-ci n’est pas soignée, des symptômes de commotion cérébrale pourraient persister même après que la lésion au cerveau soit considérée comme résolue.
En résumé, l’étude menée par le Dr Leddy démontre cliniquement que traiter la colonne cervicale est important dans les cas de patients ayant des symptômes persistants de commotion cérébrale et l’étude publiée dans le British Journal of Sports Medecine démontre cliniquement que le système vestibulaire doit également être traité afin d’obtenir de meilleurs résultats dans la résolution des séquelles liées aux commotions cérébrales.
Dans leur livre The Neurology of Eye Movements, deux chercheurs et professeurs de l’Université Harvard, le Dr R. John Leigh et le Dr David S. Zee, démontrent comment les lésions au cerveau suite, entre autres, à une commotion cérébrale, peuvent être analysées par un examen minutieux de la capacité des yeux à bouger. En étudiant la réaction des yeux à divers tests (poursuite, saccade, contre saccade, convergence, stimulus optokinétique, lumière, réflexes vestibulo-oculaires et réflexes cervico-oculaires) puis en tenant compte des signaux provenant du cou et du système vestibulaire, il est possible de localiser où se situent les lésions synaptiques dans le cerveau qui provoquent les symptômes. Aussi, en réexaminant le patient périodiquement, il est possible de suivre l’évolution de son amélioration pendant les traitements. Il n’est pas surprenant que le Dr Carrick se soit joint au Dr Leigh et au Dr Zee de l’Université Harvard pour poursuivre ces recherches sur les traumatismes cérébraux et crâniens, notamment en ce qui a trait aux stimulations neurologiques fonctionnelles sur les synapses du cerveau.
L’approche du traitement de neurologie fonctionnelle
Lorsqu’on entreprend des traitements de neurologie fonctionnelle pour soigner des lésions au cerveau, on doit d’abord évaluer l’état intégré des neurones et s’il y a de l’inflammation. L’inflammation est un processus physiologique normal qui permet d’éliminer les cellules mortes ou endommagées lors de la lésion initiale. Ensuite, les cellules microgliales du cerveau s’activent pour débrider, recycler et nettoyer les neurones morts ou endommagés. Cependant, lors d’un traumatisme crânien ces cellules peuvent devenir suractivées (primed micro-glial cells) et s’attaquer à des neurones sains. Plusieurs molécules, dont le resveratrol, le curcumin avec biopérine, le magnésium, la vitamine D3 et les omégas 3 (EDA-DHA), peuvent être utilisées pour traiter l’inflammation, car elles ont la capacité de calmer la suractivité des cellules microgliales.
Ensuite, pour optimiser le traitement de neurologie fonctionnelle, il faut s’assurer que l’oxygénation des cellules rouges soit normale en vérifiant qu’il n’y a pas présence d’anémie. Il faut également s’assurer que l’apport énergétique soit normal en faisant une recherche de l’état glycémique du patient, s’assurer que la thyroïde est normale et qu’elle ne créera pas de suractivité ou sous-activité cellulaire dans le cerveau et finalement que les différents systèmes, tels vestibulaires, du cervelet et cervico-oculaire soient normaux afin que les signaux neurologiques vers les neurones du cerveau ne comportent pas de sur ou sous-activité synaptique.
Qu’il s’agisse de traiter une lésion ablative ou fonctionnelle du cerveau, il faut réaliser une série d’examens méticuleux et complets qui comprennent :
- L’histoire des antécédents médicaux, à savoir s’il y a eu des conditions d’anémie, d’hypoglycémie, d’hypothyroïdie, de maladie neurodégénérative, de problèmes héréditaires de même que des lésions antécédentes au système nerveux
- L’aspect neurologique, comportant l’examen du mouvement des yeux sous différentes stimulations, du système vestibulaire et de l’intégrité synaptique des différents lobes du cerveau par diverses stimulations motrices, sensorielles, visuelles et auditives
- Des examens orthopédiques et physiques, incluant les radiographies nécessaires ainsi que des analyses de laboratoire
- L’évaluation des résultats de l’imagerie par résonance magnétique et par tomographie.
Un protocole du traitement de neurologie fonctionnelle est élaboré selon les résultats des divers examens et la capacité métabolique des différentes synapses à stimuler. Chaque cas est unique et le traitement est progressivement adapté selon les changements fonctionnels observés lors de la réévaluation avant et après chaque stimulation. Des exercices vestibulaires, visuels (fixation, saccades, poursuite, convergence) et de coordination impliquant le cervelet sont enseignés au patient de façon à ce qu’il puisse poursuivre sa réhabilitation synaptique quotidiennement à la maison.
Grâce à la neurologie fonctionnelle, le processus de rétablissement de la fonction cérébrale liée à des lésions ablatives ou fonctionnelles peut être étonnamment rapide, soit entre 8 à 12 semaines, selon la nature et la gravité de la lésion. Même dans les cas les plus sévères, les résultats sont très encourageants.
Contrairement à la croyance populaire que le temps et le repos vont éventuellement régler les symptômes associés à une commotion cérébrale, les séquelles peuvent persister et même se manifester des mois ou des années plus tard. Des traitements de neurologie fonctionnelle offrent une option éprouvée et efficace pour traiter les lésions cérébrales afin que la personne souffrant des séquelles puisse reprendre ses activités quotidiennes et retrouver sa qualité de vie.
Cliquez ici pour visionner une vidéo du Dr Carrick en train de traiter des patients avec des lésions cérébrales.
Auteur : Dr Yves Roy, D.C., chiropraticien
Avril 2015